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27 août 2003
Sainte Monique
Bien cher Ami de l'Abbaye Saint-Joseph,
Un
auteur français écrivait du peuple
vietnamien: «On n'en impose à ce
peuple que par la sagesse, le savoir et
la dignité morale; jamais par la force,
en laquelle il voit une forme de
barbarie». Une telle disposition a
favorisé l'implantation de la religion
catholique au Vietnam; depuis le XVIe siècle,
elle y a poussé de profondes racines,
notamment grâce aux nombreux
missionnaires martyrs, comme saint Théophane
Vénard († 1861). Au début du XXe siècle,
le Vietnam est sous domination française,
mais un nationalisme s'y développe. En
1930, Hô Chi Minh créera le Parti
Communiste vietnamien, et, en septembre
1945, s'engagera, entre les Viet-Minh
communistes et la France, une guerre qui
aboutira aux accords de Genève (juillet
1954), à la suite desquels le pays sera
coupé en deux, le Nord tombant sous régime
communiste.
C'est dans ce contexte que, le 15 mars
1928, dans un village du Nord (Tonkin),
vient au monde un garçon, Joachim Nguyên
Tan Van, en abrégé: Van. Il naît dans
une famille chrétienne qui compte déjà
un garçon et une fille, et où tout
respire la joie, reflète la beauté et
l'amour. Le père est tailleur; la mère
demeure au foyer et travaille parfois à
la rizière. Van dira de sa mère: «Dieu
l'avait douée d'un coeur ardent qui
savait allier la prudence à la bonté...
Tout en m'entourant d'affection, elle
savait aussi me former à la sainteté».
Le jeune garçon jouit d'un usage précoce
de la raison et d'une excellente mémoire,
mais aussi d'un caractère entêté,
dominateur, inflexible et cependant
hypersensible. Il n'accepte aucune séparation
d'avec sa mère. La «bonne» essaie un
jour de l'emmener jouer au loin.
Quelques minutes après, elle doit le
ramener: «Elle portait sur tout le
visage la trace de mes ongles», précise
Van.
Une goutte
d'eau dans l'océan
Van aime beaucoup le jeu. Il
organise aussi des «processions» à la
Sainte Vierge. Il a presque quatre ans,
lorsqu'une petite soeur vient au monde.
Dans l'excès de son affection pour
elle, il l'accapare tellement qu'il
devient nécessaire de l'exiler chez sa
tante. La séparation est très dure,
mais après quelques jours, il apprécie
la compagnie de ses cousins et cousines.
À l'âge de six ans, il retourne chez
ses parents, et se prépare à la première
communion. De ce jour béni, il écrira
plus tard: «L'heure a sonné, la minute
tant désirée est arrivée... Je tire
doucement la langue pour recevoir le
Pain de l'Amour. Mon coeur est envahi
par une joie extraordinaire... En un
instant, je suis devenu comme une «goutte
d'eau» perdue dans l'immense océan.
Maintenant, il ne reste plus que Jésus;
et moi, je suis le petit rien de Jésus».
À dater de ce jour, Van reçoit tous
les jours la Très Sainte Eucharistie.
Peu après, il reçoit le sacrement de
Confirmation. Dans son coeur, une
perspective d'avenir se précise: «Je désirais
vivement devenir prêtre pour aller
porter la Bonne Nouvelle aux non-chrétiens».
À l'école, le Maître se montre
excessivement sévère avec les élèves,
leur administrant des coups de rotin à
tout propos. Van y laisse la santé: «Je
devenais de jour en jour plus maigre et
plus pâle, écrira-t-il... C'est
uniquement à cause du système d'éducation
trop dur, que je suis tombé dans un tel
état d'épuisement». La mère de Van
le confie à l'abbé Joseph Nha, curé
de la paroisse de Huu-Bang. Ce prêtre
dirige une «Maison de Dieu»,
institution où de jeunes garçons
s'initient plus profondément à la
religion, tout en continuant leurs études
et en aidant le curé. Les plus capables
d'entre eux pourront être admis au
Petit-Séminaire. Les «Maisons de Dieu»
ont produit des fruits indiscutables,
mais parfois s'y sont glissés de graves
scandales. Pour Van tout débute bien;
il se passionne pour sa nouvelle vie,
devient très brillant. Cependant, sa
conduite exemplaire porte ombrage à
certains catéchistes attiédis. L'un
d'eux, Vinh, essaie en vain d'abuser de
lui, puis lui fait subir en secret une série
de sévices corporels. Après deux
semaines, la lingère de la cure
remarque des traces de sang sur le linge
de Van. L'abbé Nha, mis au courant,
fait soigner l'enfant et défend à Vinh
de le recevoir désormais dans sa
chambre.
Mais peu après, les catéchistes,
jaloux de Van, organisent une sorte de
tribunal pour le «juger». Après des
scènes humiliantes, on lui reproche ses
communions quotidiennes. Ce reproche
engendre une crise spirituelle: «J'étais
troublé et je souffrais terriblement de
penser que, sans être digne comme les
saints, j'avais eu la témérité de
communier tous les jours... J'en vins à
ne plus communier tous les jours... Je
vis alors réapparaître les défauts de
ma première enfance». Dans cette rude
épreuve, Van se tourne vers Marie et récite
avec persévérance son chapelet.
Enfin, Vinh quitte la «Maison de Dieu»
avec plusieurs autres catéchistes. Le
calme revient, mais l'ambiance de la
Maison n'a pas beaucoup changé: alcool,
jeux d'argent, grossièretés, présence
de filles dévergondées. Van doit
consacrer la majeure partie de son temps
au travail manuel. Arrivé à l'âge de
douze ans, il possède le certificat d'études,
mais on ne lui permet pas d'avancer
davantage sa scolarité, et tout son
temps est employé à des services. Un
jour, il s'enfuit pour rentrer chez ses
parents; mais ceux-ci le renvoient à
Huu-Bang. Deux mois plus tard, Van
s'enfuit à nouveau et commence une vie
de mendicité. «Mon métier, écrira-t-il,
allait consister désormais à tendre la
main aux passants... Après une semaine
de cette vie, j'étais méconnaissable.
J'avais les mains et les pieds amaigris,
la peau brunie par le soleil et les
joues creuses... Je ne trouvais pourtant
rien de pénible dans cette vie de
pauvre vagabond. J'éprouvais au
contraire une joie paisible à souffrir
pour Dieu. Je savais qu'en m'évadant,
j'avais fui le péché, j'avais fui ce
qui afflige le Coeur de Dieu».
Rentré chez lui après quelques temps
d'errance, il est reçu comme un fils dégénéré:
«Très mécontente, ma mère me
traitait comme si je n'étais plus son
enfant... la porte de mon coeur se ferma
hermétiquement: je n'osais plus lui
adresser une parole affectueuse et je
pleurais pendant de longues nuits». Lê,
sa grande soeur, reste son seul appui.
Peu après, l'abbé Nha, visitant sa
famille, n'hésite pas à accuser Van de
vol. Une tentation terrible assaille
alors l'enfant: «J'en vins à me considérer
comme un être abject. Le démon faisait
naître en moi cette pensée: si les
hommes ne peuvent plus me supporter,
comment Dieu me supporterait-il
davantage? Je vais bientôt mourir et je
devrai tomber en enfer». Heureusement,
Marie demeure son espérance. Un jour,
il ouvre son coeur à un prêtre qui le
réconforte par ces paroles: «Accepte
de bon coeur toutes ces épreuves et
offre-les au Seigneur. Si Dieu t'a envoyé
la croix, c'est un signe qu'Il t'a
choisi».
Transformée
en un instant
Noël 1940. «Le sens mystérieux
de la souffrance m'échappait, écrira
Van... Pourquoi Dieu me l'avait-Il envoyée?...
La Messe de minuit commence... Dans mon
coeur, il fait sombre et froid».
L'instant de la communion arrive: «J'étreins
Jésus dans mon coeur. Une joie immense
me saisit... Pourquoi mes souffrances me
paraissent-elles si belles? Impossible
à dire... En un instant, mon âme fut
transformée. Je n'avais plus peur de la
souffrance... Dieu me confiait une
mission: celle de changer la souffrance
en bonheur... Puisant sa force dans
l'Amour, ma vie ne sera plus désormais
que source de bonheur». Cette grâce
n'est pas une illusion: Van n'est plus
le même. Son cadre de vie change également:
sa tante Khanh le prend chez elle pour
plusieurs mois. Une humble tâche lui
incombe: faire paître le boeuf. Mais il
intensifie son union à Dieu. Il écrira:
«Combien d'âmes, dans leur relation à
Dieu, ont encore peur de Lui comme d'un
être très élevé et très lointain?
Ne percevant pas ce qu'est l'Amour, ces
gens-là n'osent jamais se permettre la
moindre pensée d'intimité avec Dieu».
Van butte cependant encore sur ses défauts.
À la suite d'une vexation, il s'obstine
à très peu manger et sa tante doit le
ramener chez ses parents. Peu après,
l'abbé Nha vient rétablir la vérité
sur l'affaire du vol, innocenter Van et
demander à le reprendre à Huu-Bang.
Après avoir prié, Van accepte. Mais à
Huu-Bang, le désordre et le scandale règnent
toujours. «Pourquoi Dieu m'a-t-Il poussé
à revenir?» se demande Van. Inspiré
par la Sainte Vierge, il fait le voeu de
virginité. Puis, il comprend que sa
mission est de s'opposer aux mauvais
exemples et d'aimer ses compagnons, ce
qu'il s'applique à réaliser avec un
groupe de camarades plus jeunes.
Jamais je
n'y parviendrai
Grâce à un ami, Van est admis
au Petit-Séminaire de Lang-Son, en
1942. Six mois après, faute de
ressources, l'établissement doit fermer
ses portes, mais Van peut continuer ses
études à la cure de la paroisse
Sainte-Thérèse de l'Enfant-Jésus de
Quang-Uyên, sous la conduite de deux Pères
dominicains. Il veut devenir saint, mais
ne sait comment faire: «Malgré mon
immense désir d'arriver à la sainteté,
j'avais la certitude que jamais je n'y
parviendrais, car pour être un saint,
il faut jeûner, se frapper à coups de
fouet, porter une pierre au cou, des chaînettes
hérissées de pointes, une chemise de
crins durs, endurer le froid, la gale,
etc. Mon Dieu, s'il en est ainsi, je
renonce... Tout cela est bien au-dessus
de mes forces».
Van étale sur une table plusieurs vies
de saints. Puis, les yeux fermés, il
pose sa main au hasard: «J'ouvris les
yeux, ma main était posée sur un livre
que je n'avais encore jamais lu: Histoire
d'une âme de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus...
À peine avais-je lu quelques pages, que
deux torrents de larmes coulèrent sur
mes joues... Ce qui me bouleversa, ce
fut le raisonnement de la petite Thérèse:
«Si Dieu ne s'abaissait que vers les
fleurs les plus belles, symbole des
saints docteurs, son amour ne serait pas
assez absolu, car le propre de l'Amour
c'est de s'abaisser jusqu'à l'extrême
limite... De même que le soleil éclaire
en même temps les cèdres et chaque
petite fleur comme si elle était seule
sur la terre, de même Notre-Seigneur
s'occupe aussi de chaque âme comme si
elle n'avait pas de semblable»... J'ai
compris alors que Dieu est Amour...
Je puis me sanctifier au moyen de toutes
mes petites actions... Un sourire, une
parole ou un regard, pourvu que tout
soit fait par amour». Un matin, Van se
rend au pied de la colline voisine.
Soudain, dans le silence, il sursaute:
une voix l'appelle. «Van, Van, mon cher
petit frère!» Personne autour de lui!
La voix reprend: «Van, mon cher petit
frère!» Il pousse un cri de joie: «Oh!
c'est ma soeur, Thérèse – Oui, c'est
bien ta soeur, Thérèse... Tu seras désormais
personnellement mon petit frère... À
partir de ce jour, nos deux âmes ne
feront qu'une seule âme, dans le seul
amour de Dieu... Dieu veut que les leçons
d'amour qu'Il m'a enseignées autrefois
dans le secret du coeur, se perpétuent
en ce monde. C'est pourquoi Il a daigné
te choisir comme petit secrétaire pour
réaliser son oeuvre».
Raconte-lui
tes jeux de billes
Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus
l'enseigne: «Dieu notre Père veille
sur les moindres détails de nos vies...
Dieu est Père et ce Père est Amour. Il
est d'une bonté et d'une bienveillance
infinies... Mais depuis le jour où nos
premiers parents ont péché, la crainte
a envahi le coeur de l'homme et lui a
enlevé la pensée d'un Dieu Père,
infiniment bon... Alors, Dieu a envoyé
son Fils... Jésus est venu dire à ses
frères les hommes que l'amour du Père
est une source inépuisable... Être les
enfants de Dieu, c'est là pour nous un
immense bonheur. Soyons-en fiers et ne cédons
jamais à une crainte excessive... N'aie
jamais peur de Dieu... Ne crains pas de
te montrer familier avec le Bon Dieu
comme avec un ami. Raconte-Lui tout ce
que tu veux: tes jeux de billes,
l'ascension d'une montagne, les
taquineries de tes camarades, tes colères,
tes larmes ou les petits plaisirs d'un
instant... – Mais, petite soeur, Dieu
connaît déjà toutes ces choses... –
C'est vrai, petit frère... Cependant,
pour donner l'amour et recevoir l'amour,
Il doit s'abaisser et Il le fait comme
s'Il oubliait qu'Il connaît toute
chose, dans l'espoir d'entendre une
parole intime jaillir de ton coeur».
Depuis fort longtemps, Van désire
devenir prêtre: «Pour cela, écrira-t-il,
j'ai tout sacrifié en m'imposant de
nombreux efforts tant spirituels que
corporels». Mais un jour, Thérèse lui
dit: «Van, mon petit frère, j'ai une
chose importante à te dire... Mais cela
va te rendre très triste... Dieu m'a
fait connaître que tu ne seras pas prêtre».
Le jeune homme se met à sangloter: «Je
ne pourrai jamais vivre sans être prêtre...
– Van, reprend Thérèse, si Dieu veut
que ton apostolat s'exerce dans une
autre sphère, qu'en penses-tu?... Ce
qui demeure le plus parfait, c'est de
faire la volonté de notre Père du
Ciel... Tu seras avant tout apôtre par
la prière et le sacrifice, comme je
l'ai été moi-même autrefois». Thérèse
oriente alors le regard de Van sur ce
passage si important de l'Histoire
d'une âme: «J'ai compris que
l'Amour seul faisait agir les membres de
l'Église... Je compris que l'Amour
renfermait toutes les vocations, que
l'Amour était tout, qu'il embrassait
tous les temps et tous les lieux... en
un mot, qu'il est Éternel».
Van demeure intrigué: «Thérèse, ma
soeur, en quoi consiste cette vocation
cachée, si je ne deviens pas prêtre?
– Tu entreras dans un couvent où tu
te consacreras à Dieu». Une nuit de
l'hiver 1942-1943, Van fait un rêve
mystérieux: «J'aperçus quelqu'un qui
s'avançait vers la tête de mon lit...
Ce personnage habillé tout de noir était
assez grand et son visage reflétait une
grande bonté... Il me posa la question:
«Mon enfant, veux-tu?» Spontanément,
je répondis: «oui»». Quelques jours
plus tard, Van découvre dans la maison
une statue qui ressemble étrangement à
son rêve: c'est celle de saint Alphonse
de Liguori, fondateur des Rédemptoristes
(1696-1787). Sainte Thérèse lui
confirme sa vocation de Frère rédemptoriste,
puis lui annonce de nouvelles épreuves:
«Petit frère chéri, tu rencontreras
des épines sur la route, et le ciel
maintenant serein se couvrira de sombres
nuages... Tu verseras des larmes, tu
perdras la joie et tu seras comme un
homme réduit au désespoir... Mais
souviens-toi que le monde a ainsi traité
Jésus et qu'un Rédemptoriste ressemble
à son Sauveur... Cependant, n'aie pas
peur. Pendant cette tempête, Jésus
continuera à vivre dans la barque de
ton âme... Petit frère, tu ne
m'entendras plus causer aussi familièrement
avec toi comme je le fais maintenant. Ne
va pas croire que je t'abandonne; au
contraire, je reste sans cesse près de
toi comme se doit une grande soeur... En
ce monde, c'est la souffrance qui est la
preuve de ton amour, c'est la souffrance
qui donne à ton amour toute sa
signification et sa valeur».
Jusqu'au
bout de la route
Peu après, à la cure de
Quang-Uyên, le climat se dégrade en
raison des restrictions de nourriture
dues à la guerre. Après bien des
brimades, Van est chassé de la
communauté, début juin 1943. Au bord
du désespoir, il s'écrie: «Ô mon
Dieu, je veux mourir et mourir ici-même
pour n'avoir pas à porter cette honte
en présence de ma famille!» Mais Thérèse,
qui s'est tue depuis longtemps,
l'encourage à nouveau. Van se tourne
vers la Très Sainte Vierge: «Ô Mère,
je m'abandonne entièrement à toi... Je
n'ai que mes blessures et mes larmes à
t'offrir... Mais avec toi, je veux aller
jusqu'au bout de la route...» De retour
chez ses parents, il demande son
admission chez les Rédemptoristes de
Hanoï. Le 16 juillet 1944, il se présente
au couvent, mais, devant sa jeunesse, on
lui impose d'attendre trois ans. Abattu,
il rentre chez lui. Cependant, sa mère
l'encourage à persévérer.
De fait, début août, sur la
recommandation d'une personne amie, Van
est reçu chez les Rédemptoristes d'Hanoï
comme domestique et, le 17 octobre
suivant, il est enfin admis au postulat
et reçoit le nom de Frère Marcel. Après
les joies du début, les croix ne
manquent pas: surtout les moqueries de
ses confrères. Dès son noviciat, à la
demande de son conseiller spirituel, il
écrit son autobiographie. Pendant deux
ans, Jésus, Marie et Thérèse le
favorisent de colloques intimes. Mais,
le 9 septembre 1946, lendemain de sa
première profession, Jésus lui dit: «Mon
enfant, ta part à toi, maintenant,
c'est de sacrifier les moments de douce
intimité avec moi, pour me permettre
d'aller à la recherche des pécheurs...
Ensuite, mon petit Van, sache que tu
auras à souffrir de la part des supérieurs
et des frères; mais ces épreuves
seront le signe que tu es agréable à
mon Coeur. Je te mendie toutes ces
souffrances pour t'unir à moi dans
l'oeuvre de sanctification des prêtres».
Frère Marcel entre dans une nouvelle «nuit»
de la foi. Tout le côté sensible
disparaît et il ne reste plus que la
monotonie du sacrifice, dans la foi
pure. En 1950, le jeune Frère est envoyé
à Saïgon puis à Dalat. En juillet
1954, le Nord-Vietnam est livré aux
communistes: de nombreux catholiques
s'enfuient vers le Sud. Quelques Rédemptoristes
demeurent dans la maison de Hanoï pour
prendre soin des chrétiens qui restent.
Frère Marcel comprend que Jésus lui
demande de les rejoindre: «J'y vais,
dit-il, pour qu'il y ait quelqu'un qui
aime le Bon Dieu au milieu des
communistes». Après quelques semaines,
il écrit à sa soeur Anne-Marie: «Bien
souvent, je suis accablé de tristesse,
et je ne fais que penser: Ah! si je n'étais
pas venu à Hanoï... Mais il y avait
tellement d'insistance dans la voix de Jésus!»
Le samedi 7 mai 1955, en allant au marché,
il entend des gens critiquer le
gouvernement du Sud. Frère Marcel
intervient: «Moi, j'arrive du Sud et le
gouvernement n'a jamais agi de la sorte!»
Quelques minutes plus tard, il est arrêté
et conduit au bureau de la Sûreté,
puis incarcéré. Cinq mois après, il
est transféré à la prison centrale de
Hanoï où il retrouve de nombreux
catholiques et des prêtres. Il écrit
à son Supérieur: «Si je voulais
vivre, ce me serait facile: je n'aurais
qu'à vous accuser. Mais soyez sans
crainte, jamais je n'y consentirai».
Puis, à son confesseur: «Dans les
derniers mois, j'ai dû lutter de toutes
mes forces et endurer tous les supplices
du lavage de cerveau. L'ennemi a employé
bien des ruses pour me faire capituler,
mais je n'ai admis aucune lâcheté».
À sa soeur: «Rien ne peut m'enlever
l'arme de l'amour. Aucune affliction
n'est capable d'effacer le sourire
bienveillant que je laisse paraître sur
mon visage amaigri. Et pour qui la
caresse de mon sourire, si ce n'est pour
Jésus, le Bien-Aimé?... Je suis la
victime de l'Amour et l'Amour est tout
mon bonheur, un bonheur indestructible».
Un petit curé
de paroisse
Un an après son arrestation,
calme et maître de lui, il comparaît
devant le tribunal de Hanoï. Sur son
refus d'avouer qu'il a fait de la
propagande pour le Président du
Sud-Vietnam, il est condamné à quinze
ans de réclusion dans un camp de «rééducation».
On le conduit au camp n° 1, où il
retrouve des catholiques «tous très
fermes dans la foi». Il écrit: «Je
suis très occupé, comme l'est un petit
curé de paroisse. En dehors des heures
de travail obligatoire, je dois
continuellement accueillir les gens qui
viennent les uns après les autres
chercher du réconfort auprès de moi...
Dieu lui-même m'a fait savoir que
j'accomplis sa volonté. Bien des fois,
je lui ai demandé la faveur de mourir
dans ce camp, mais chaque fois, Il m'a répondu:
je suis prêt à suivre ta volonté
comme tu suis toujours la mienne, mais
il y a les âmes qui ont encore besoin
de toi...»
En août 1957, Frère Marcel Van est
transféré au camp n° 2. Après une
tentative d'évasion pour aller chercher
des hosties, il est repris, battu et
enfermé dans un cachot malsain. Tout se
durcit autour de lui: plus de visites,
plus de courrier, et, au début de 1958,
il passe trois mois dans les fers, seul,
sans appui, ni lumière, sauf celle qui
brille dans son coeur. Rongé par la
tuberculose et le béribéri, il rend le
dernier soupir le 10 juillet 1959, à l'âge
de 31 ans.
Au lendemain de sa profession
religieuse, frère Marcel Van avait
entendu Jésus lui dire: «Mon enfant,
par amour pour les hommes, offre-toi
avec moi pour qu'ils soient sauvés».
Assuré de la valeur de la souffrance
unie à celle du Christ, il a écrit: «Jésus
voulait se servir de mon corps pour
endurer la souffrance, la honte et l'épuisement,
afin que la flamme de l'Amour qui dévore
son divin Coeur puisse se répandre dans
le coeur de tous les hommes sur la terre».
Demandons-lui de nous apprendre à
transformer la tristesse de nos
souffrances en joie de participer à
l'amour rédempteur du Sauveur.
Le procès informatif en vue de la béatificationde
Van a été ouvert en 1997.
Dom Antoine Marie osb
P. S. Nous recevrons avec gratitude
toutes les adresses d'éventuels
lecteurs que vous voudrez bien nous
envoyer. N'hésitez pas à nous demander
nos tracts sur la Religion catholique,
la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ,
un «petit livre de prières», des
scapulaires du Mont-Carmel avec notice
explicative, les promesses du Sacré-Coeur,
les mystères du Rosaire.
Numéros des comptes
Suisse : -C.C.P. : «Abbaye Saint-Joseph
de Clairval» 19-5447-7 Sion ou chèques.
Belgique : -C.C.P. : «Abbaye
Saint-Joseph de Clairval»
000-1339871-10 ou chèques.
France : -C.C.P. : «Abbaye Saint-Joseph
de Clairval» 5618 78 A Dijon ou chèques.
USA : -Chèques bancaires ordinaires en
$ us (pas besoin de chèques
internationaux spéciaux).
Canada : -Chèques bancaires ordinaires
en $ can. (pas besoin de chèques
internationaux spéciaux).
Pour publier notre lettre dans une
revue, journal ... ou pour la mettre sur
un web site ou une home page une
autorisation est nécessaire. Elle doit-être
demandée à :
mel : abbaye@clairval.com
Pour plus de renseignements sur l'abbaye
vous pouvez consulter notre site ; vous
y trouverez , entre autre, les lettres
spirituelles du deuxième semestre 1996
à l'année 2001, le programme des
retraites pour l'année 2003 :
http://www.clairval.com/
ou
http://www.userpage.
fu-berlin.de/~vlaisney/index.htm
Les moines prient à toutes vos
intentions
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