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:
abbaye@clairval.com
5
mars
2003
Mercredi
des Cendres
Bien
cher
Ami
de
l'Abbaye
Saint-Joseph,
Israël,
un
jeune
Juif,
a
sympathisé
à
l'école
avec
Stanislas,
un
jeune
Chrétien.
Invité
chez
ce
dernier,
il
aperçoit
un
crucifix
suspendu
au
mur.
Israël
n'en
a
encore
jamais
vu.
Rentré
chez
lui,
il
interroge
sa
famille
sur
cet
homme
pendu
à
une
croix;
on
lui
répond:
«Ceci
intéresse
les
Chrétiens,
pas
nous».
Bien
plus
tard,
il
lira
dans
le
prophète
Isaïe
les
chants
du
Serviteur
du
Seigneur,
où
est
présenté
l'homme
le
plus
innocent
et
le
plus
pur,
frappé,
humilié
et
mis
à
mort
pour
nos
péchés;
surgira
alors
en
son
esprit
cette
question
lancinante:
«Le
crucifié
que
j'ai
vu,
n'était-il
pas
ce
serviteur
de
Yahvé?»
Ce
jeune
Israël,
de
la
famille
Zoller,
est
né
le
17
septembre
1881,
à
Brody,
en
Galicie
(sud-est
de
la
Pologne)
alors
autrichienne.
Il
est
le
plus
jeune
de
cinq
enfants.
De
religion
israélite,
la
famille
possède
une
certaine
aisance
car
le
père
est
propriétaire
d'une
soierie
à
Lodz,
en
territoire
russe.
En
1888,
le
Tsar
décide
de
nationaliser
toute
entreprise
dont
les
propriétaires
seraient
des
étrangers;
l'usine
de
M.
Zoller
à
Lodz
est
confisquée
sans
compensation
financière.
Le
train
de
vie
de
la
famille
se
réduit
considérablement
et
les
fils
aînés
doivent
s'éloigner
pour
chercher
du
travail.
À
sept
ans,
Israël
suit
l'école
primaire
hébraïque,
où
les
enfants
apprennent
par
coeur
des
passages
de
la
Bible.
Mais
le
goût
de
la
connaissance
religieuse
lui
vient
principalement
de
son
père.
De
son
côté,
sa
mère
lui
apprend
à
secourir
les
nécessiteux;
émue
par
la
misère
d'autrui,
elle
multiplie
les
bonnes
oeuvres,
faisant
au
besoin
appel
à
d'autres
dames
de
son
quartier,
juives
ou
catholiques.
Dans
la
région
de
Brody,
il
n'y
a
entre
Juifs
et
Chrétiens
ni
mépris,
ni
méfiance.
Un
lien,
en
effet,
«relie
spirituellement
le
peuple
du
Nouveau
Testament
avec
la
lignée
d'Abraham.
L'Église
reconnaît
que
les
prémices
de
sa
foi
et
de
son
élection
se
trouvent,
selon
le
mystère
divin
du
salut,
dans
les
patriarches,
Moïse
et
les
prophètes.
Elle
confesse
que
tous
les
fidèles
du
Christ,
fils
d'Abraham
selon
la
foi,
sont
inclus
dans
la
vocation
de
ce
patriarche
et
que
le
salut
de
l'Église
est
mystérieusement
préfiguré
dans
la
sortie
du
peuple
élu
hors
de
la
terre
de
servitude.
C'est
pourquoi
l'Église
ne
peut
oublier
qu'elle
a
reçu
la
révélation
de
l'Ancien
Testament
par
ce
peuple
avec
lequel
Dieu,
dans
sa
miséricorde
indicible,
a
daigné
conclure
l'Acienne
Alliance»
(Vatican
II,
Nostra
ætate,
4).
En
1904,
Israël
quitte
sa
famille
qu'il
ne
reverra
jamais.
Sa
mère,
qui
a
toujours
désiré
le
voir
devenir
Rabbin,
vient
de
mourir.
Tout
en
donnant
des
cours
pour
subvenir
aux
besoins
des
siens,
il
étudie
la
philosophie
à
l'université
de
Vienne,
puis
à
celle
de
Florence
où
il
achève
un
doctorat;
parallèlement,
il
poursuit
des
études
rabbiniques.
Nommé
en
1913
vice-Rabbin
de
Trieste,
alors
port
autrichien,
il
épouse
Adèle
Litwak,
Juive
de
Galicie;
de
cette
union
naît
une
fille,
Dora.
Au
cours
de
la
première
guerre
mondiale,
Israël
est
poursuivi
par
la
police
autrichienne
comme
partisan
de
l'Italie,
parce
qu'il
a
étudié
dans
ce
pays.
À
la
fin
du
conflit,
Trieste
est
rattachée
à
l'Italie
et
Israël
Zoller
est
nommé
Grand
Rabbin
de
la
ville.
Jésus
n'était-il
pas
un
fils
de
mon
peuple?
En
1917,
il
a
la
profonde
douleur
de
perdre
sa
femme.
À
cette
époque,
il
fait
une
expérience
mystique:
un
après-midi,
«tout
d'un
coup
et
sans
savoir
pourquoi,
comme
en
extase,
j'invoquai
le
nom
de
Jésus...
Je
le
vis
comme
en
un
grand
tableau...
Je
le
contemplai
longuement,
sans
agitation,
ressentant
plutôt
une
parfaite
sérénité
d'esprit...
Je
me
disais:
Jésus
n'était-il
pas
un
fils
de
mon
peuple?»
Rien
de
prémédité,
rien
de
préparé.
C'est
un
premier
appel
discret
du
Christ.
Zoller
se
remarie
en
1920
avec
Emma
Majonica,
qui
lui
donne
une
seconde
fille,
Myriam.
De
1918
à
1938,
résidant
toujours
à
Trieste,
il
enseigne
l'hébreu
et
les
langues
sémitiques
anciennes
à
l'université
de
Padoue.
Fait
surprenant,
il
fréquente
aussi
bien
le
Nouveau
Testament
que
l'Ancien.
Ainsi,
la
personne
de
Jésus-Christ
et
son
enseignement
lui
deviennent-ils
familiers.
Il
ne
peut
s'empêcher
de
comparer
l'Ancien
Testament
au
Nouveau:
«La
justice,
dans
l'Ancien
Testament,
s'exerce
d'homme
à
homme...
Nous
faisons
le
bien
pour
le
bien
reçu;
nous
faisons
le
mal
pour
le
mal
que
nous
avons
souffert
d'autrui.
Ne
pas
rendre
le
mal
pour
le
mal
est,
d'une
certaine
manière,
faillir
à
la
justice».
Quel
contraste
avec
l'Évangile:
Aimez
vos
ennemis...
priez
pour
eux,
ou
bien
avec
la
dernière
parole
de
Jésus
sur
la
croix:
Père,
pardonnez-leur,
car
ils
ne
savent
pas
ce
qu'ils
font!
«Tout
ceci
me
stupéfie,
écrit
Zoller;
le
Nouveau
Testament
est,
en
effet,
un
Testament
nouveau».
Et
il
précise:
«Ici
commence
une
nouvelle
terre,
un
nouveau
ciel...
Les
riches
attachés
à
la
terre
sont
pauvres
et
les
pauvres
qui
ont
su
s'en
détacher
sont
vraiment
riches,
parce
qu'ils
possèdent
un
royaume
qui
appartient
aux
affligés,
aux
silencieux
et
aux
persécutés,
qui
n'ont
jamais
persécuté
mais
qui
ont
aimé».
Peu
à
peu,
Zoller
découvre
le
lien
qui
unit
les
deux
Testaments.
En
effet,
«inspirateur
et
auteur
des
livres
de
l'un
et
l'autre
Testament,
Dieu
les
a
sagement
disposés
de
telle
sorte
que
le
Nouveau
soit
caché
dans
l'Ancien
et
que,
dans
le
Nouveau,
l'Ancien
soit
dévoilé...
Les
livres
de
l'Ancien
Testament...
atteignent
et
montrent
leur
complète
signification
dans
le
Nouveau
Testament»
(Concile
Vatican
II,
Dei
Verbum,
16).
Le
Nazaréen
Par
ailleurs,
Zoller
constate
avec
peine
que,
chez
ses
coreligionnaires,
«l'amour
de
la
Loi
l'emporte
souvent
sur
la
loi
de
l'Amour»;
les
minuties
de
la
casuistique
rabbinique
éclipsent
le
grand
commandement
de
la
loi
révélée
par
Dieu
à
Moïse:
Tu
aimeras
le
Seigneur
ton
Dieu
de
tout
ton
coeur,
de
toute
ton
âme...
(Dt
6,
5).
En
sa
qualité
de
spécialiste
des
langues
anciennes,
il
découvre
que
le
nom
de
Nazareth
s'applique
d'abord
à
la
petite
ville
où
Jésus
a
vécu
pendant
ses
trente
premières
années;
mais,
ce
nom
signifie
également
que
Jésus
de
Nazareth
est
le
Nazir
(le
Consacré)
annoncé
par
le
prophète
Isaïe:
Un
rameau
sortira
du
tronc
de
Jessé,
et
de
ses
racines
croîtra
un
rejeton
(en
hébreu:
nazer)
sur
qui
reposera
l'Esprit
du
Seigneur
(Is.
11,
1).
Il
expose
cette
découverte
dans
son
oeuvre
capitale
des
vingt
années
passées
à
Trieste:
«Le
Nazaréen»
(1938).
La
concordance
frappante
entre
le
récit
de
la
Passion
du
Christ
dans
l'Évangile
et
le
Serviteur
souffrant
décrit
par
le
prophète
Isaïe
huit
siècles
avant
son
avènement,
ne
laisse
à
Zoller
aucun
doute
sur
l'accomplissement
en
Jésus
de
la
prophétie:
Méprisé,
homme
de
douleur
et
sachant
ce
qu'est
la
souffrance...
nous
ne
l'avons
pas
reconnu.
Pourtant,
il
s'est
chargé
du
poids
de
nos
souffrances;
c'est
lui
qui
les
a
portées...
Il
était
blessé
à
cause
de
nos
péchés,
écrasé
à
cause
de
nos
crimes...;
c'est
par
ses
meurtrissures
que
nous
sommes
guéris
(Isaïe
53,
3-5).
De
plus,
l'examen
des
déclarations
de
Jésus
sur
sa
divinité
le
conduit
à
écrire:
«Le
Christ
est
le
Messie;
le
Messie
est
Dieu;
donc
le
Christ
est
Dieu».
Zoller
est
intellectuellement
convaincu,
mais
il
n'a
pas
encore
la
foi;
celle-ci
est
une
grâce
qu'il
recevra
sept
ans
plus
tard.
Le
rapprochement
de
Mussolini
et
de
l'Allemagne
hitlérienne
entraîne,
à
la
fin
des
années
30,
des
campagnes
antisémites
en
Italie,
surtout
à
proximité
des
frontières
du
troisième
Reich.
À
Trieste,
où
les
Juifs
sont
nombreux,
un
historien
catholique
organise
une
série
de
conférences
antisémites.
Un
large
auditoire
est
attendu.
Zoller
décide
d'intervenir
auprès
d'un
Jésuite,
ami
du
conférencier.
Le
religieux
ménage
une
rencontre
entre
le
Rabbin
et
l'orateur.
Avec
douceur
et
bonté,
Zoller
exhorte
son
interlocuteur,
au
nom
des
principes
chrétiens
et
spécialement
du
pardon
accordé
par
Jésus-Christ
sur
la
Croix,
à
annuler
ses
conférences.
Le
professeur
objecte
l'embarras
de
sa
situation:
tout
est
organisé.
Le
Rabbin
hausse
les
épaules
et
lui
conseille
seulement
de
lire
l'Évangile
comme
il
le
fait
souvent
lui-même;
il
lui
prédit:
«Le
temps
est
proche
où
nous
deviendrons
tous
deux
de
bons
amis».
Le
dimanche
suivant,
devant
une
salle
bondée,
le
conférencier
annonce
qu'un
Juif
de
haut
rang
a
éclairé
sa
conscience;
il
ne
veut
plus
continuer
dans
le
chemin
où
il
s'est
égaré
jusqu'à
présent
et
annule
les
conférences
prévues.
Mais
déjà
des
lois
discriminatoires
ont
été
édictées
contre
les
Juifs;
Israël
Zoller
«italianise»
son
nom
en
Zolli;
bientôt
cependant,
il
est
privé
de
la
nationalité
italienne,
sans
être
autrement
inquiété.
En
1940,
la
communauté
israélite
de
Rome
lui
offre
la
place
vacante
de
Grand
Rabbin
de
cette
capitale.
Il
accepte
le
poste
proposé,
en
vue
de
protéger
ses
frères
dans
la
persécution
qui
s'annonce,
et
d'apaiser
les
divisions
au
sein
de
la
communauté
juive
dont
il
exhorte
les
membres
à
laisser
de
côté
la
politique
et
à
s'occuper
davantage
de
prière,
d'enseignement
et
d'entraide;
mais
cet
appel
ne
rencontre
guère
d'écho.
Une
solidarité
qui
sauve
En
septembre
1943,
après
la
chute
de
Mussolini
et
l'armistice
signé
par
le
roi
d'Italie
Victor-Emmanuel
III
avec
les
Anglo-américains,
Hitler
envoie
trente
divisions
allemandes
occuper
le
nord
et
le
centre
de
l'Italie.
Himmler,
chef
suprême
de
la
S.S.,
juge
le
moment
venu
d'appliquer
en
Italie
la
politique
d'extermination
de
la
race
juive.
Il
ordonne
au
chef
des
S.S.
à
Rome,
le
lieutenant-colonel
Kappler,
de
rassembler
tous
les
Juifs,
hommes
et
femmes,
enfants
et
vieillards,
pour
les
déporter
en
Allemagne.
Le
lieutenant-colonel
Kappler
profite
de
l'ordre
de
déportation
qu'il
a
reçu
pour
exercer
un
chantage;
il
convoque
les
deux
Présidents
de
la
communauté
juive
de
Rome
et
les
somme
de
lui
remettre
dans
les
vingt-quatre
heures
50
kilos
d'or,
sous
peine
de
déportation
immédiate
pour
tous
les
hommes
de
la
population
juive
de
la
ville.
Il
s'agit
en
fait
d'une
liste
de
trois
cents
otages,
en
tête
de
laquelle
figure
Zolli.
Le
lendemain,
la
communauté
israélite
n'a
pu
rassembler
que
35
kilos
d'or.
On
demande
au
Grand
Rabbin
d'aller
au
Vatican
pour
essayer
d'emprunter
ce
qui
manque.
Il
parvient
à
entrer
au
Vatican,
dont
toutes
les
issues
sont
contrôlées
par
la
Gestapo,
par
une
porte
dérobée
à
l'arrière
de
la
Cité,
et
expose
au
Secrétaire
d'État
de
Pie
XII,
le
Cardinal
Maglione,
sa
demande
d'un
prêt
de
15
kilos
d'or,
donnant
comme
garantie
sa
propre
personne.
Le
prélat
en
réfère
au
Saint-Père
puis
demande
à
Zolli
de
revenir
avant
13
heures.
Mais
peu
après,
Zolli
apprend
que
la
quantité
d'or
exigée
a
déjà
pu
être
amassée,
grâce
à
la
contribution
de
prêtres
et
de
nombreuses
organisations
catholiques.
Ce
n'est
toutefois
qu'un
répit.
Le
Grand
Rabbin
s'efforce
de
convaincre
les
Juifs
de
Rome
de
se
disperser
pour
éviter
la
déportation.
Bientôt
l'ambassadeur
allemand
auprès
du
Saint-Siège,
von
Weizsäcker,
secrètement
hostile
à
la
politique
nazie,
avertit
le
Pape
qu'Himmler
a
ordonné
la
déportation
de
tous
les
Juifs
d'Italie.
Pie
XII
ordonne
aussitôt
au
clergé
romain
d'ouvrir
les
sanctuaires
afin
de
recevoir
les
Juifs
qui
viendraient
s'y
cacher.
Zolli,
dont
la
tête
est
mise
à
prix,
vit
les
neuf
mois
suivants
dans
la
clandestinité,
et,
en
dernier
lieu,
chez
des
amis
chrétiens
de
sa
fille
Dora;
il
parvient
ainsi
à
échapper
à
la
Gestapo.
Mais
malgré
les
précautions
prises,
dans
la
nuit
du
15
au
16
octobre,
un
millier
de
Juifs
romains
(sur
environ
8000)
sont
arrêtés
et
déportés;
la
plupart
ne
reviendront
pas.
«Désormais
tu
me
suivras»
Le
4
juin
1944,
la
ville
de
Rome
est
libérée
par
les
forces
américaines.
Par
décret
ministériel
du
21
septembre
1944,
Israël
Zolli,
démis
de
sa
charge
sept
mois
plus
tôt
par
les
chefs
de
la
communauté
juive,
redevient
Grand
Rabbin
de
Rome.
Lors
de
la
fête
du
Yom
Kippour
(Expiation),
en
octobre
1944,
il
préside
dans
la
synagogue
de
Rome
les
prières
du
Grand
Pardon:
«Soudain,
écrira-t-il,
je
vis
avec
les
yeux
de
l'esprit,
une
grande
prairie,
et,
debout
au
milieu
de
l'herbe
verte,
se
tenait
Jésus
revêtu
d'un
manteau
blanc...
À
cette
vue,
j'éprouvai
une
grande
paix
intérieure,
et
au
fond
de
mon
coeur,
j'entendis
ces
paroles:
«Tu
es
ici
pour
la
dernière
fois.
Désormais,
tu
me
suivras».
Je
les
accueillis
dans
la
plus
grande
sérénité
et
mon
coeur
répondit
aussitôt:
«Ainsi
soit-il,
ainsi
le
faut-il»...
Une
heure
plus
tard,
après
le
souper,
dans
ma
chambre,
ma
femme
me
déclara:
«Aujourd'hui,
tandis
que
tu
te
tenais
devant
l'Arche
de
la
Torah,
il
me
semblait
que
la
figure
blanche
de
Jésus
t'imposait
les
mains,
comme
s'Il
te
bénissait».
J'étais
stupéfait...
À
ce
moment
là,
notre
plus
jeune
fille,
Myriam,
qui
était
retirée
dans
sa
chambre
et
n'avait
rien
entendu,
m'appela
pour
me
dire:
«Vous
êtes
en
train
de
parler
de
Jésus-Christ.
Tu
sais,
Papa,
ce
soir
j'ai
vu
en
rêve
un
grand
Jésus
tout
blanc».
Je
leur
souhaitai
une
bonne
nuit
à
toutes
les
deux
et,
sans
aucune
gêne,
je
continuai
de
réfléchir
à
la
concordance
extraordinaire
des
événements».
Quelques
jours
plus
tard,
le
Grand
Rabbin
renonce
à
sa
charge
et
va
trouver
un
prêtre
afin
de
compléter
son
instruction
des
vérités
de
la
foi.
Le
13
février
1945,
Monseigneur
Traglia
confère
le
sacrement
de
Baptême
à
Israël
Zolli
qui
choisit
pour
prénom
chrétien
celui
d'Eugenio,
en
hommage
de
reconnaissance
au
Pape
Pie
XII
pour
son
action
déterminante
en
faveur
des
Juifs
pendant
la
guerre.
L'épouse
de
Zolli,
Emma,
reçoit
le
Baptême
avec
son
mari
et
ajoute
à
son
prénom
celui
de
Maria.
Leur
fille
Myriam
suivra
ses
parents
après
un
an
de
réflexion
personnelle.
Le
baptême
d'Eugenio
Zolli
est
l'aboutissement
d'une
longue
évolution
spirituelle:
«Cet
événement,
dans
mon
âme,
était
comme
l'arrivée
d'un
hôte
bien-aimé.
Je
commençais
seulement
à
entendre
la
voix
du
Christ
exprimée
plus
clairement
et
plus
fortement
dans
les
Évangiles.
Dans
mon
âme,
Dieu
ne
se
révélait
point
par
les
moyens
de
la
tempête
ni
du
feu,
mais
à
travers
un
doux
murmure...
Je
devenais
conscient
d'un
Dieu
que
j'aimais,
un
Dieu
qui
veut
qu'on
L'aime
et
qui
Lui-même
aime...
Le
converti,
comme
le
miraculé,
est
l'objet
(celui
qui
reçoit),
et
non
le
sujet
(l'auteur)
du
prodige.
Il
est
faux
de
dire
de
quelqu'un
qu'il
s'est
converti,
comme
s'il
s'agissait
d'une
initiative
personnelle.
Du
miraculé
on
ne
dit
pas
qu'il
s'est
guéri,
mais
qu'il
a
été
guéri.
Du
converti,
il
faut
en
dire
autant».
Tous
les
hommes
sont
ses
enfants
On
a
souvent
demandé
à
Zolli
s'il
s'était
converti
par
gratitude
envers
le
Pape
Pie
XII.
Il
a
toujours
répondu
négativement,
ajoutant
toutefois:
«On
pourrait
dire
du
règne
de
Pie
XII
qu'il
est
inspiré
par
les
paroles
du
prophète
Isaïe:
«La
paix
est
l'harmonie,
la
paix
est
le
salut
pour
ceux
qui
sont
proches
comme
pour
ceux
qui
sont
loin,
je
veux
tous
les
guérir»
(cf.
Is.
57,
19).
L'Église
Catholique
aime
toutes
les
âmes.
Elle
souffre
avec
tous
et
pour
tous;
elle
attend
avec
amour
tous
ses
enfants
sur
le
seuil
sacré
de
Pierre,
et
ses
enfants
sont
tous
les
hommes...
Il
n'existe
pas
de
lieu
de
souffrances
que
l'esprit
d'amour
de
Pie
XII
n'ait
atteint...
Au
cours
de
l'histoire,
aucun
héros
n'a
commandé
une
telle
armée.
Aucune
force
militaire
n'a
été
plus
combattante,
aucune
n'a
été
plus
combattue,
aucune
n'a
été
plus
héroïque
que
celle
menée
par
Pie
XII
au
nom
de
la
charité
chrétienne».
Selon
l'historien
israélien
Pinchas
Lapide,
l'Église
Catholique
a
pu,
par
son
action
charitable,
sauver
d'une
mort
certaine
environ
850
000
Juifs
habitant
les
territoires
occupés
par
le
troisième
Reich
(Cf.
Pie
XII
et
la
Seconde
Guerre
mondiale,
par
le
RP.
P.
Blet
s.j.,
Éd.
Perrin,
1997,
p.
323).
Le
soir
de
son
Baptême,
Zolli
n'a
même
pas
de
quoi
dîner;
Mgr
Traglia
lui
fait
l'aumône
de
cinquante
lires.
À
l'âge
de
soixante-cinq
ans,
il
se
trouve
brutalement
confronté
à
de
graves
problèmes
matériels,
à
commencer
par
celui
de
la
subsistance
de
sa
famille.
Jusqu'alors,
il
a
toujours
vécu
de
ses
honoraires
de
Rabbin
et
de
professeur.
Il
accepte
cette
nouvelle
situation
avec
le
plus
grand
détachement:
«Je
demande
l'eau
du
Baptême
et
rien
de
plus.
Je
suis
pauvre
et
je
vivrai
pauvre.
J'ai
confiance
en
la
Providence».
La
nouvelle
du
Baptême
du
Grand
Rabbin
de
Rome
déclenche
un
concert
de
calomnies.
On
l'accuse,
entre
autres
griefs,
d'avoir
apostasié
par
intérêt.
Il
lui
est
facile
de
répondre:
«Les
Juifs
qui
se
convertissent
aujourd'hui,
comme
à
l'époque
de
saint
Paul,
ont
tout
à
perdre
en
ce
qui
concerne
la
vie
matérielle,
et
tout
à
gagner
en
vie
de
la
grâce».
Au
reproche
de
trahison,
il
répond
avec
indignation:
«Le
Dieu
de
Jésus-Christ,
de
Paul,
n'est-il
pas
le
Dieu
même
d'Abraham,
d'Isaac
et
de
Jacob?»
De
nos
jours,
certains
Catholiques
estiment
inutile
qu'un
Juif
se
convertisse
pour
devenir
Chrétien.
Cette
opinion
est
contredite
par
l'enseignement
du
concile
Vatican
II:
«Seul,
en
effet,
le
Christ
est
médiateur
et
voie
de
salut:
or,
il
nous
devient
présent
en
son
Corps,
qui
est
l'Église;
et
en
nous
enseignant
expressément
la
nécessité
de
la
foi
et
du
baptême
(cf.
Mc
16,16),
c'est
la
nécessité
de
l'Église
elle-même,
dans
laquelle
les
hommes
entrent
par
la
porte
du
Baptême,
qu'il
nous
a
confirmée
en
même
temps.
C'est
pourquoi
ceux
qui
refuseraient
soit
d'entrer
dans
l'Église
Catholique,
soit
d'y
persévérer,
alors
qu'ils
la
sauraient
fondée
de
Dieu
par
Jésus-Christ
comme
nécessaire,
ceux-là
ne
pourraient
pas
être
sauvés»
(Lumen
gentium,
14).
À
quinze
heures,
comme
Jésus
Sur
l'intervention
du
Saint-Père,
Eugenio
Zolli
est
nommé
professeur
à
l'Institut
Biblique
Pontifical.
En
octobre
1946,
il
entre
dans
le
Tiers-Ordre
de
Saint-François
dont
la
caractéristique
est
la
pauvreté
évangélique
pratiquée
par
les
laïcs
dans
le
monde.
Zolli,
paroissien
fidèle
de
l'église
«Stella
Matutina»,
assiste
discrètement
aux
entretiens
sur
l'Évangile
donnés
par
son
curé.
À
Noël
1955,
il
fait
lui-même
une
conférence
sur
l'annonce
du
Rédempteur
dans
l'Ancien
Testament.
Mais
en
janvier
1956,
il
est
atteint
d'une
broncho-pneumonie.
Sa
femme
Emma
est,
elle
aussi,
malade
et
âgée.
Leur
seconde
fille,
Myriam,
qui
s'est
mariée
et
a
donné
le
jour
à
une
petite
fille,
Maura
Brigida,
se
tient
au
chevet
de
son
père
dans
cette
dernière
maladie.
Une
semaine
avant
sa
mort,
Eugenio
confie
à
une
religieuse
qui
le
soigne:
«Je
mourrai
le
premier
vendredi
du
mois,
à
quinze
heures,
comme
Notre-Seigneur».
Le
vendredi
2
mars,
dans
la
matinée,
il
reçoit
la
Sainte
Communion.
Tombé
dans
le
coma,
à
midi,
Eugenio
Zolli
remet
son
âme
à
Dieu
à
trois
heures
de
l'après-midi.
Il
avait
écrit
au
terme
de
ses
mémoires:
«Nous
ne
pouvons
nous
confier
qu'à
la
miséricorde
de
Dieu,
à
la
pitié
du
Christ,
que
l'humanité
met
à
mort
parce
qu'elle
ne
sait
pas
vivre
en
Lui.
Nous
ne
pouvons
nous
remettre
qu'à
l'intercession
de
Celle
dont
le
coeur
fut
transpercé
par
la
lance
qui
perça
le
côté
de
son
Fils».
Par
son
itinéraire
spirituel,
Eugenio
Zolli
manifeste
la
continuité
entre
l'ancienne
Alliance
et
la
Nouvelle:
Ne
pensez
pas
que
je
sois
venu
abolir
la
loi
ou
les
Prophètes;
je
ne
suis
pas
venu
abolir,
mais
accomplir,
avait
dit
Jésus
(Mt
5,
17).
«Dieu
a
visité
son
peuple.
Il
a
accompli
les
promesses
faites
à
Abraham
et
à
sa
descendance.
Il
l'a
fait
au-delà
de
toute
attente:
Il
a
envoyé
son
Fils
bien-aimé...
Après
avoir,
à
bien
des
reprises
et
de
bien
des
manières,
parlé
par
les
prophètes,
Dieu
en
ces
jours
qui
sont
les
derniers,
nous
a
parlé
par
son
Fils
(He
1,
1-2).
Le
Christ,
le
Fils
de
Dieu
fait
homme,
est
la
Parole
unique,
parfaite
et
indépassable
du
Père.
En
Lui,
Il
dit
tout,
et
il
n'y
aura
pas
d'autre
parole
que
celle-là...
«Dès
lors
qu'Il
nous
a
donné
son
Fils,
qui
est
sa
Parole,
écrit
saint
Jean
de
la
Croix,
Dieu
n'a
pas
d'autre
parole
à
nous
donner...
Voilà
pourquoi
celui
qui
voudrait
maintenant
L'interroger,
ou
désirerait
une
vision
ou
une
révélation,
non
seulement
ferait
une
folie,
mais
ferait
injure
à
Dieu,
en
ne
jetant
pas
les
yeux
uniquement
sur
le
Christ,
sans
chercher
autre
chose»»
(Catéchisme
de
l'Église
Catholique,
nn.
422
et
65).
Pour
Zolli,
les
exigences
qu'entraîne
cette
vérité
n'ont
pas
été
faciles
à
mettre
en
oeuvre;
à
la
fin
de
sa
vie,
il
disait:
«Vous
qui
êtes
nés
dans
la
religion
Catholique,
vous
ne
vous
rendez
pas
compte
de
la
chance
que
vous
avez
d'avoir
reçu
dès
l'enfance
la
grâce
du
Christ;
mais
celui
qui,
comme
moi,
est
arrivé
au
seuil
de
la
foi
après
un
long
travail
poursuivi
pendant
des
années,
apprécie
la
grandeur
du
don
de
la
Foi
et
ressent
toute
la
joie
qu'il
y
a
à
être
chrétien».
Rendons
grâces
à
Dieu
pour
le
don
de
la
Foi
qu'il
nous
a
accordé
sans
mérite
de
notre
part.
Conservons
ce
trésor
par
une
vie
sainte,
et
prions
pour
que
tous
les
hommes
connaissent
le
Messie,
croient
en
Lui
et
obtiennent
la
Vie
éternelle.
Bibliographie:
Eugenio
Zolli,
par
Judith
Cabaud,
Éd.
F.-X.
de
Guibert,
Paris,
2000.
Dom
Antoine
Marie
osb
P.
S.
Nous
recevrons
avec
gratitude
toutes
les
adresses
d'éventuels
lecteurs
que
vous
voudrez
bien
nous
envoyer.
N'hésitez
pas
à
nous
demander
nos
tracts
sur
la
Religion
catholique,
la
divinité
de
Notre-Seigneur
Jésus-Christ,
un
«petit
livre
de
prières»,
des
scapulaires
du
Mont-Carmel
avec
notice
explicative,
les
promesses
du
Sacré-Coeur,
les
mystères
du
Rosaire.
Numéros
des
comptes
Suisse
:
-C.C.P.
:
«Abbaye
Saint-Joseph
de
Clairval»
19-5447-7
Sion
ou
chèques.
Belgique
:
-C.C.P.
:
«Abbaye
Saint-Joseph
de
Clairval»
000-1339871-10
ou
chèques.
France
:
-C.C.P.
:
«Abbaye
Saint-Joseph
de
Clairval»
5618
78
A
Dijon
ou
chèques.
USA
:
-Chèques
bancaires
ordinaires
en
$
us
(pas
besoin
de
chèques
internationaux
spéciaux).
Canada
:
-Chèques
bancaires
ordinaires
en
$
can.
(pas
besoin
de
chèques
internationaux
spéciaux).
Pour
publier
notre
lettre
dans
une
revue,
journal
...
ou
pour
la
mettre
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autorisation
est
nécessaire.
Elle
doit-être
demandée
à
:
mel
:
abbaye@clairval.com
Pour
plus
de
renseignements
sur
l'abbaye
vous
pouvez
consulter
notre
site
;
vous
y
trouverez
,
entre
autre,
les
lettres
spirituelles
du
deuxième
semestre
1996
à
l'année
2000,
le
programme
des
retraites
pour
l'année
2001
et
début
2002
:
http://www.clairval.com/
ou
http://www.userpage.
fu-berlin.de/~vlaisney/index.htm
Les
moines
prient
à
toutes
vos
intentions
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